11 octobre 2005

L'Ephemère et l'Eternel : partie 3

Deux heures. Bientôt deux heures qu'il courait, ses poumons n'étaient plus que douleur dans un corps qu'il ne sentait plus. Sa course ralentissait, se fit plus maladroite.

Jon s'arrêta. Il ne pouvait plus. Ne voulait plus. S'appuyant d'une main sur la paroi, il vomit tripes et boyaux, durant un temps qui lui paru infiniment long. Il finit par s'asseoir, dos au mur, et se rappela qu'il avait toujours son couteau dans sa main droite, totalement engourdie et ankylosée a force de serrer son arme.
Que lui arrivait-il ? Son esprit encore fiévreux ne parvenait pas a distinguer le réel de l'imaginaire. Car il ne pouvait raisonnablement pas avoir vécu ce qui le faisait encore trembler. Cette voix...ce rêve...Impossible.

« Ouais, impossible, t'as juste déliré, et maintenant t'es paumé dans le putain de sous-sol parisien... Super. » marmonna-t-il

Ses yeux s'étaient légèrement habitués a l'obscurité, mais il avait depuis longtemps dépassé les dernières bornes lumineuses de secours, et à présent, il ne parvenait a voir que de fugaces contours, dans une obscurité presque totale.
Donc retrouver une sortie serait plus que difficile, sans compter qu'il n'arrivait pas à se défaire d'une angoisse qu'il jugeait injustifiée. "Le peuple de l'ombre", vraiment, faudrait penser à arrêter les drogues.

Se redressant lentement, Jon avança à tâtons, ignorant volontairement de réfléchir à la direction qu'il prenait, de peur d'hésiter indéfiniment. Un tel choix n'était pas faisable, il avait donc décidé de ne pas le faire. Rencontrant un mur, il continua en maintenant sa main gauche contre celui-ci, et se mit en route.
Au bout d'une demi-heure, il dû s'arrêter pour enlever sa veste. La température était montée sensiblement, il transpirait maintenant à grosses gouttes. L'air était aussi plus lourd, plus pesant, et les courants d'airs qu'il avait pu sentir pendant sa fuite effrénée brillait maintenant par leur absence.
Étrangement, le sol s'inclinait à présent en une pente douce, qui se percevait a peine. ''Plutôt mauvais, ça, j'sais pas où j'vais finir.'' pensa Jon.
Et des irrégularités se faisaient un peu plus fréquentes, comme si le matériau de recouvrement s'était dégradé, et que son état empirait tandis que Jon progressait.

Il avait perdu toute notion du temps. Seule la hausse régulière de la température et la disparition progressive du béton mesuraient son avancée, laquelle lui donnait l’impression d’aller droit au centre de la Terre. Le son de ses pas le laissait penser qu’il évoluait sur de la terre, des cailloux, enfin, plus grande chose qui ait à voir avec le sol du métro parisien. Il trébuchait souvent, tombait parfois, s’écorchant les bras et les genoux, luttant pour se relever et continuer.

Jon désespérait. Il était a bout, son corps meurtri et sa bouche pâteuse lui rappelait sans cesse sa soif, insupportable dans cette chaleur. La mort n’allait pas tarder, et il en venait à la souhaiter, ne voyant aucune solution possible. Il poursuivait par réflexe, ne supportant pas l’idée de s’asseoir et de se laisser mourir. Non, il n’était pas comme ça.

Même le mur sous sa main avait changé, il s’en rendait seulement compte. Ce n’était plus que de la roche brute, mais qui pourtant devait avoir été creusé, sinon comment expliquer cette galerie ?
D’ailleurs, il voyait les traces des outils qui avaient pu servir à creuser, et la teinte brune du mur.

« Merde, de la lumière ! ».

Jon venait seulement d’y penser. S’il apercevait la paroi, c’est qu’il y avait forcément une source de lumière, même si cette dernière était faible.

« Mais où je suis ? C’est pas possible…J’y comprend rien, bordel. »

Il se perdait en conjecture, s’emmêlait dans ses réflexions, l’esprit affaiblit et au bord de la démence, tant ce qu’il voyait était une impossibilité.

Il venait d’arriver au bout du tunnel. Et il ne pouvait pas être-là, face à ça. Il avait failli tomber, le dénivelé du sol s'étant accentué dangeuresement. Il était sur le flanc d’une sorte de falaise, la lumière a présent crépusculaire ne lui permettant pas de bien distinguer son environnement.
Mais cette masse végétale inextricable, d’arbres titanesques, de lianes et des hautes fougères était bien visible, occultant tout le reste, si reste il y avait.